La fête qui Coûte!



Le rond-point Singers de Goma, Juin 2015,Photo crédit Charly Kasereka
TOUT LE MONDE EN PARLE A GOMA, ON PARLE DE DEUX MILLE INVITÉS POUR L’ANNIVERSAIRE DE LA PREMIERE DAME


C'est papier a été publié par Francis Visso sur le groupe facebook ''Parlons en'' 

« Il y a une sorte de honte d’être heureux, à la vue de certaines misères », disait le Duc de La Rochefoucauld. 

«Il est immoral d’être heureux tout seul», enchainait le philosophe grec Sophocle. Durant trois jours, du 30 juillet au 1er août, le champagne a coulé à flots à Goma à l’occasion de la célébration du 40ème anniversaire de l’épouse «Kabila», née Marie-Olive Lembe di Sita. 

Des avions affrétés  ont déversé leurs «cargaisons» d’invités. Des invités triés sur le volet. Les uns venus de Kinshasa et de quelques villes du pays. Les autres, de l’étranger. Le gotha politique était représenté par le Premier ministre Augustin Matata Ponyo et plusieurs autres membres du gouvernement.

 Des mandataires du portefeuille de l’Etat – les fameux Administrateurs délégués généraux – étaient également conviés.
 Des députés nationaux et provinciaux, mêmement. Pour agrémenter ces journées, rien n’a été laissé au hasard : plusieurs groupes musicaux kinois ont fait le voyage. Qui oserait jeter la première pierre à « Mama Olive » pour avoir soufflé ses 40 bougies avec fracas? Personne. Là où le bât blesse est qu’un banal « événement privé » s’est mué en une «fête officielle» au point de mobiliser les plus hauts responsables du pays et les finances publiques. Combien a pu coûter ce festin au trésor public ? Samedi 1er août, jour de la clôture de ces « festivités », l’ombre de « Joseph Kabila » était introuvable. L’homme serait resté, semble-t-il, à Lubumbashi…
«Oh ! Seigneur, comme je serais heureuse de souffler mes bougies avec vous ce vendredi 31 juillet 2015, sur l’avenue Bunagana à Himbi, dans la ville de Goma, en province du Nord Kivu, à partir de 19 heures, cordiale bienvenue. Prière de confirmer votre présence au numéros … ». C’est le texte du carton d’invitation qui a été adressé aux invités estimés à deux mille.
Selon des sources à Goma, « Mama Olive » y a construit un « Palais pharaonique». « A côté, les palais présidentiels à Gbado Lite et Kawele ne sont que des cabanes», ironisait un des invités joint au téléphone, samedi soir, par l’auteur de ses lignes.
Pour l’anecdote, en lieu et place de recevoir une coupe de champagne, il semble que les amateurs de ce breuvage – fort prisé par les snobs et autres nouveaux riches – se voyaient remettre carrément la coupe et la bouteille. Plusieurs convives se baladaient avec leur fiasque. On imagine le caractère cocasse de la scène.
A en croire ces sources, l’ordre formel a été donné aux convives de ne capturer ni photo ni image. Que voudrait-on cacher ?
Goma : 2000 invités pour les "40 bougies" de "maman Olive"« Mama Olive » qui aime ponctuer ses propos de quelques « paroles bibliques », a associé plusieurs « musiciens spirituels ». Le très officieux site « /www.digitalcongo.net/simplesearch/olive%20lembe » signale la présence notamment du chanteur-religieux Patrice Musoko et du groupe Gaël.
Des observateurs s’interrogeaient samedi 1er août de l’absence de « Joseph Kabila » à cette fête. D’aucuns pensent que le « raïs » aurait été « sensibilisé » in extremis sur le «risque» que l’étalage d’une « opulence arrogante » soit associé à son image. Et ce, au moment où le Congo dit démocratique est présenté par le FMI comme un des pays les plus pauvres au monde. D’autres parlent d’incohérence entre la « richesse scandaleuse » étalée par « la Présidente » et la “mission moralisatrice” confiée au conseiller spécial Emmanuel Luzolo Bambi Lessa, chargé de lutter contre la corruption, le blanchiment et les détournements des deniers publics.
Née le 29 juillet 1976 à Kailo, au Maniema, «Marie-Olive» a grandi à Goma. C’est dans cette ville qu’elle a accompli ses études primaires et secondaires. C’est encore dans cette ville qu’elle faisait des “affaires” au moment où elle fera la connaissance de « Joseph Kabila ». A l’époque, celui-ci était le chef d’état-major de la force terrestre. Le mariage du couple a été célébré le 17 juin 2006 à Kinshasa.
Le scénario Poutine-Medvedev
Lors de l’élection présidentielle du 28 novembre 2011, «Marie-Olive» est sortie de son rôle de « ménagère de luxe ». Dès le mois de mai, elle est descendue sur l’arène politique pour battre campagne en langues du cru.
Le 17 mai 2011, elle s’est rendue dans la province de l’Equateur où elle a passé une dizaine de jours. A Mbandaka, elle va inviter une population convaincue, à tort ou à raison, d’être mal aimée par le pouvoir en place, de « marcher la main dans la main avec le président Joseph Kabila dans son œuvre de reconstruction nationale.» Des observateurs cherchent en vain la moindre reconstruction dans cette partie du pays.
Le 19 décembre 2013, « Marie-Olive » est sortie encore de son rôle pour « présider » une cérémonie regroupant 720 couples issus de la « communauté des forces armées ». La cérémonie a lieu au Palais du peuple. Dans une brève adresse, elle exhorta les conjoints présents à préserver la cohésion familiale. Elle ne s’arrêta pas là en mettant l’accent sur l’assistance que son présidentiel d’époux déploie en faveur des «hommes en uniformes» et leurs familles.
Ces sorties médiatiques ont suffi par faire courir les rumeurs les plus folles selon lesquelles l’actuel locataire du palais de la nation – dont le second et dernier mandat expire le 19 décembre 2016 -, envisagerait un scénario à la Poutine et Medvedev. En clair, «Marie-Olive» devrait se présenter à l’élection présidentielle de 2016. En cas de victoire, «Joseph» lui pourrait occuper le poste de premier ministre. Risible ?
Il reste que depuis plusieurs mois, des observateurs avertis du «sérail kabiliste» assurent que les « services d’études stratégiques » de la Présidence de la République envisageraient le plus sérieusement du monde de présenter la candidature de la « première dame » lors du scrutin présidentiel de 2016.
Le 4 mai 2015, « Marie Olive » a accordé une longue interview en lingala à plusieurs journalistes. C’était à Lubumbashi. A la question de savoir si son époux la préparait à prendre sa «succession», elle a lancé une phrase énigmatique : «Le président va respecter la Constitution ». Question : “Joseph Kabila” se serait-il volontairement absenté à l’anniversaire de son épouse de crainte de “voler la vedette” à celle-ci?
Un des invités de se confier: «On n’est pas sorti de l’auberge! Le faste insolent étalé durant trois jours par Madame la Présidente pour ses 40 ans – pendant que des gens crèvent de faim à Goma – vient confirmer que les mœurs politiques n’ont pas changé dans ce pays. Les dirigeants ne pensent qu’à s’enrichir. J’ai eu l’impression de revivre l’époque de la Deuxième République. Le pays a besoin d’une moralisation de la vie publique. C’est urgent! Une moralisation que ne pourrait accomplir qu’un leadership exigeant et exemplaire. On est loin du compte… »

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