SOUS LA MENACE DES REBELLES, LA VILLE DE GOMA SOMBRE DANS LA VIOLENCE


Un      cadavre   emporté   mardi matin  à  Goma.     Photo : Charly Kasereka.

À Goma, chef-lieu du Nord-Kivu (province de l'est congolais) sous la menace qoutidienne d'un assaut des rebelles du M23, chaque matin, les habitants font le triste décompte des meurtres et des agressions commises la nuit précédente.

Goma, ville de plus de 400 000 habitants, vit depuis plusieurs mois avec à sa porte les rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23), une rébellion née de la défection, en mars, d’anciens insurgés enrôlés dans l’armée congolaise en 2009. Les positions des rebelles se trouvent actuellement à une trentaine de kilomètres de la ville, dans le territoire de Rutshuru, frontalier du Rwanda et de l'Ouganda.

Dans ce contexte très instable, les autorités de la ville ont signalé une nette recrudescence des meurtres et des attaques à main armée depuis le mois de mai. Des incidents qui sont devenus quasiment quotidiens depuis deux semaines. Le 23 septembre par exemple, trois personnes dont un capitaine de la garde républicaine, ont été tuées dans une attaque à l’arme à feu et à la grenade. Le 26, la résidence d’un officiel était prise pour cible par des tirs. Le 28, c’est un opérateur du secteur pétrolier qui était retrouvé tué par balle. Chaque nuit connaît par ailleurs son lot de vols à main armée et d’agressions physiques.

Dimanche, le ministre de l’Intérieur affirmait qu’une vingtaine de personnes suspectées d’avoir participé à cette vague de "terrorisme urbain" avaient été arrêtées, parmi lesquelles des civils mais aussi des éléments de l’armée congolaise (FARDC).

Après cette annonce, les rebelles se sont empressés, lundi, de dénoncer l’incapacité du président congolais, Joseph Kabila, de contrôler son armée, affirmant qu’ils envisageaient de "prendre Goma pour sauver la population" alors qu’une trêve relative était observée depuis début août.

Plusieurs responsables locaux, dont le maire de la ville et le responsable de la police de Goma, ont quant à eux imputé ces exactions à des éléments du M23 infiltrés. Une accusation immédiatement démentie par le porte-parole de l'armée congolaise au Nord-Kivu, le colonel Olivier Amuli, qui parle lui de "banditisme traditionnel".

Attroupement un matin   après  la mort dans le mabanga-Nord, le 26 septembre à Goma; Photo Charly kasereka

"Le maire de la ville a conseillé aux habitants d’utiliser, en cas d’attaques, des sifflets pour alerter le voisinage"

Charly Kasereka est blogueur à Goma'.

Il y a toujours eu de l’insécurité à Goma, mais là c’est bien plus inquiétant. Depuis le 23   septembre, j’ai répertorié 15 personnes tuées. Par ailleurs, beaucoup d’habitants se font voler leurs biens et doivent ensuite vivre avec les traumatismes de l’agression.
 Les nouvelles n’arrêtent pas. Dans un quartier, c’est un capitaine de la garde républicaine qui est                    emporté par une rafale de balles alors qu’il buvait une bière, dans un autre, un homme se fait arracher            sa moto et tabasser. La situation est telle que le 26 septembre, une réunion spéciale sur la sécurité                  s’est tenue au gouvernorat de la province mais, le soir même, c’est la maison du vice-gouverneur qui              était prise qui essuyait des coups de feu et des tirs de grenade. Hier soir encore, un confrère                          journaliste qui se baladait la nuit tombée ;a été tabassé et racketté. Personnellement, je ne sors plus                après 18h car c’est le moment où les bandes armées sillonnent les rues. "  

Service funèbre de Goma ce Mardi après la mort d'un présumé voleur tué par des habitants.

"Les soldats n’hésitent pas à faire commerce de leurs armes à des bandits"

Le maire de la ville a prodigué des conseils aux habitants en cas d’attaques comme par exemple utiliser des sifflets pour alerter le voisinage, mais les habitants ont du mal à garder leur sang froid. Ce matin encore, une personne a été retrouvée morte tabassée. En l’occurrence, ce sont des habitants qui l’ont tuée parce qu’ils le soupçonnaient d’être un voleur. Les habitants sont en pleine psychose car il n’y a pas vraiment de cible identifiable.
On peut imaginer que certaines agressions sont des règlements de compte perpétrés par des sympathisants du M23, mais il y aussi une augmentation de la délinquance en générale. Depuis que la guerre a repris, des camps militaires ont été installés en plein cœur de la ville. Étant très mal payés, certains soldats n’hésitent pas à vendre leurs armes à des bandits, augmentant de fait l’insécurité dans tout Goma.
Cordon de police le 25 septembre, après le meurtre d'un membre de la Garde Républicaine et Deux autres personnes, à Goma.
Le cadavre d'une victime de violences, le 25 septembre. Toutes les photos ont été prises par Charly Kasereka.
Billet écrit avec la collaboration  de Charly Kasereka avec Ségolène Malterre, journaliste à France 24.http://observers.france24.com/fr/content/20121002-alors-rebelles-sont-portes-goma-ville-sombre-violence-nord-kivu-guerre-m23-criminalite

Commentaires